
Un jour, j'ai eu un chat. Probablement en panne d'inspiration le jour où je suis allée le choisir, j'ai décidé de l'appeler Minet. Un chat jaune. Colleux. Sans malice. À la limite d'être niaiseux. Un peu comme son maître, le dernier qualificatif en moins.
Minet avait des griffes. Allait dehors. Souvent quand j'arrivais, il siégeait sur le garde de la galerie, entouré de sa gang de chums félins. Il ne protégeait pas son territoire, il se laissait envahir. Un peu comme son maître aussi.
Il m'a fait cadeau de souris, mulots. Il était très reconnaissant. Aimait me gâter. Un peu comme son maître avec ceux qu'il aime.
Un jour, nous sommes déménagés. Dans un village voisin, à une vingtaine de kilomètres. Dans le brouhaha du gros camion Budget, du réfrigérateur soulevé par des hommes forts, de l'odeur de Windex et de Monsieur Net au citron, Minet s'est enfui.
C'était au mois de mai. Les jours passèrent. Le temps faisait sûrement la vie dure à Minet. Orages, forts vents déracinant les arbres et emportant avec eux quelques toits de maison faibles. Pas de traces de Minet.
Une quarantaine de jours plus tard, le téléphone sonne. Les propriétaires de notre ancienne maison sont au bout de la ligne avec un chat jaune no name qui se frotte en faisant une série de huits autour de leurs mollets. Minet est retourné chez lui comme un grand, bravant champs, forêts, animaux et intempéries.
Mon faible sens de l'orientation m'aurait empêchée de faire comme Minet. Émue et fière de lui, je suis retournée le chercher.
Les chats sont forts. L'homme est faible.
Petite pensée pour cet
homme trouvé enseveli sous la neige en Gaspésie.